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Le fou de Aloysius Bertrand

Le fou

La lune peignait ses cheveux avec un démêloir d'ébène
qui argentait d'une pluie de vers luisants les collines,
les prés et les bois.

Scarbo, gnome dont les trésors foisonnent, vannait sur
mon toit, au cri de la girouette, ducats et florins qui
sautaient en cadence, les pièces fausses jonchant la rue.

Comme ricana le fou qui vague, chaque nuit, par la cité
déserte, un oeil à la lune et l'autre - crevé !

- " Foin de la lune ! grommela-t-il, ramassant les jetons
du diable, j'achèterai le pilori pour m'y chauffer au
soleil ! "

Mais c'était toujours la lune, la lune qui se couchait. -
Et Scarbo monnoyait sourdement dans ma cave ducats et
florins à coups de balancier.

Tandis que, les deux cornes en avant, un limaçon qu'avait
égaré la nuit, cherchait sa route sur mes vitraux lumineux.

Les poèmes de Aloysius Bertrand

 

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