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Le démoniaque de Jean Moréas

Le démoniaque

Ai-je sucé les sucs d'innomés magistères
Quel succube au pied bot m'a-t-il donc envoûté ?
Oh ! ne l'être plus, oh ! ne l'avoir pas été !
Suc maléfique, ô magistères délétères !

Point d'holocauste offert sur les autels des Tyrs,
Point d'âpres cauchemars, d'affres épileptiques !
Seuls les rêves pareils aux ciels clairs des triptyques,
Seuls les désirs nimbés du halo des martyrs !

Qui me rendra jamais l'Hermine primitive,
Et le Lys virginal, et la sainte Forêt
Où, dans le chant des luths, Viviane apparaît
Versant les philtres de sa lèvre fugitive !

Hélas ! hélas ! au fond de l'Érèbe épaissi,
J'entends râler mon coeur criblé comme une cible.
- Viendra-t-on te briser, sortilège invincible ? -
Hâte-toi, hâte-toi, bon Devin, car voici

Que l'Automne se met à secouer les Roses,
Et que les joueurs rieurs s'effacent au lointain ;
Et qu'il va s'éteignant le suave Matin :
- Et demain, c'est trop tard pour les Métamorphoses !

Les poèmes de Jean Moréas

 

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